La question essentielle. Quelles bière est la meilleure au Vietnam. Au risque du péril de ma vie, j’en ai goûté quelques une avec un pote vietnamien Mo Dhé Ration !
C’est la Bia Saigon Spécial qui remporte la palme d’Humulus lupulus !
Cheers
Pré carré
J’ai 23 ans, pas de fric, sportif, étudiant pas trop mauvais en géographie. J’étudie l’Afrique sous toutes ses formes. Physiques, environnementales et géopolitiques notamment. Je n’ai pas la moindre idée de ce que je vais faire de ma vie. Un jour, pour rire avec des amis en sortant de cours on se rend dans un bureau de recrutement de l’armée. On rencontre chacun à son tour un officier. Le gars que j’y vois est sympa. On rigole tous les deux un peu de la situation. J’ai pas spécialement envie de courir dans la boue avec un flingue. Encore moins d’avoir à m’en servir un jour. Ma démarche relève plus de la curiosité que de l’intérêt. On parle de l’Afrique où il a passé un peu de temps. J’ai des idées bien trempées sur l’action de mon pays qui y perdure et dont je doute sérieusement de la pertinence et du bienfondé. En sortant je rejoins mes amis au café du coin où on a convenu de se retrouver. Comme à notre habitude, on bois des bières et on refait le monde. Le rendez-vous est assez peu concluent pour tout le monde. C’est le bilan de notre fin d’après midi chez les bidas.
A cette époque je sors avec la sublime Iris. Une très belle jeune femme qui me plait beaucoup. Je l’ai rencontré à la bibliothèque universitaire ou je dévore tout ce qui a trait à l’Afrique. Une amie nous a présenté. Au début je ne l’intéresse pas du tout mais on échange beaucoup et on s’entend bien. Je la recroise quelques temps plus tard alors que j’arbore une sublime moustache en croc, hommage à Dali et Hercules Poirot. On déjeune ensemble et lui demande ce que je pourrais faire pour passer plus de temps avec elle. Elle répond du taco-tac : « coupe ta moustache ». Je la retrouve le lendemain glabre et souriant. Le charme opère. Après quelques jours passionnels, sa peur de l’engagement prend le dessus et elle me quitte autour d’un café au goût amer. Dévasté, je rentre chez moi et écoute à fond, comme un remède, une bonne partie du répertoire de Jacques Brell. Entre « Ne me quitte pas » et « Mathilde est revenue », le téléphone sonne. Le volume est au maximum et j’ai du mal à entendre mon interlocuteur. Je crois percevoir : « Monsieur Dupont, Colonel Farnez au téléphone ». Pensant qu’il doit s’agir d’un ami au courant de la mauvaise nouvelle et voulant me remonter le morale en me faisant une blague potache, j’éclate de rire. Au ton insistant de mon interlocuteur, je fini par baisser le volume. Quelque peu énervé, il précise que suite à mon entretien récent avec le service de recrutement de l’armée, il souhaite me rencontrer. Sans préciser pourquoi, ce qui pique ma curiosité, il me propose une date et un lieu de rendez-vous. La rencontre doit avoir lieux au Bar Populaire ou j’ai mes habitudes. J’accepte avec l’espoir de me faire rincer à l’oeil. Mon choix est également motivé par la rupture que je subis et une furieuse envie de me changer les idées. Mes potes n’ont pas été contactés et trouvent ça tout aussi étrange que moi. Particulièrement le lieux du rendez-vous. Deux d’entre eux disponible ce jour là. Je leur propose de venir aussi. D’arriver un peu avant moi pour voir et de me filer un coup de main en cas de pépin. Piqués par la curiosité, ils acceptent. Le jour J, j’entre dans le bar un peu en retard comme à mon habitude. Mes amis sont là en train de siroter une mousse. Mon rendez-vous que je dois reconnaître à son tee shirt jaune est assis seul à une table en plein milieu des clients. Il regarde sa montre et me dévisage. On est en plein dans un roman d’espionnage. J’adore. L’atmosphère est bruyante. La sono crache un ska suranné. Du Madness il me semble. Je commande une bière et m’installe à la table de mon improbable rendez-vous. La poignée de main est ferme. Le gars a l’air plutôt sympa. La trentaine. Habillé décontracté, il ne ressemble pas à l’idée qu’on se fait d’un militaire. En plus il a l’air d’avoir une bonne descente. Il a déjà un verre vide devant lui et attaque sa deuxième blonde. Je n’ai que cinq minutes de retard. Après les salamalecs d’usage il attaque :
J’ai l’impression d’avoir marqué des points mais je ne vois toujours pas où il veut en venir. Je lui demande :
Il se lève en souriant et se baisse vers moi pour me dire :
Le mec sort du bar sans se retourner. Je fini ma bière en prenant mon temps et en me repassant le fils de notre discussion. J’ai envie d’en savoir plus. Si ce gars est aussi bien informé, il faudra jouer le jeux. Je fini par me lever, commande une autre bière au zinc, avant de rejoindre mes potes à leur table, ça se bouscule dans ma tête. Michel et Thierry trépignent sur leurs sièges.
On éclate de rire et les bières s’enchainent. On reparlera de l’histoire avec le reste de la bande. Je donnerai plus de détails pour broder mais ne dévoilerai rien à propos d’une suite éventuelle. Ça sera la dernière fois que j’aborderai le sujet avec mes proches d’ailleurs. Ce qui se passera par la suite sera compartimenté entre ceux qui ont besoin d’en connaître et de l’autre mon quotidien professionnel et personnel. C’est une expérience très riche, qui peut vous faire ressentir une forme de schysophrénie et qui sera d’un point de vue émotionnel très dur et solitaire. Raconter tout cela aujourd’hui pourrait s’apparenter à une thérapie pour moi. Maintenant que cette histoire est derrière moi et que je peux enfin en parler librement j’ai l’impression de me libérer d’un poids. D’un isolement dans lequel j’ai dû m’enfermer et qui m’a coûté beaucoup d’un point de vue sentimental et amical.
Je rencontre ensuite Stéphanie. Une très belle journaliste. Je me sent bien et croque la vie à pleine dents. Peu de temps après le début de notre relation, alors que je rentre de la fac en moto, un type s’arrête à côté de moi à un feu rouge. Il roule sur une double cylindre anglaise rutilante et tonitruante. Une Norton. Il me fait un petit signe de la tête comme il est de mise chez les motards. Je réponds à son salut et le feu passe au vert. A l’intersection suivante, le gars est toujours à côté de moi. Il lève sa visière et me demande :
Le tricolore passe au vert. Il démarre sur les chapeaux de roue. JE me mets dans sa roue. Je bénie ma bonne étoile d’avoir investi pour pouvoir travailler en intérim dans une petite 125 pourrie mais hyper réactive. J’arrive à le suivre tant bien que mal et à me faufiler dans la circulation dense de la ville à la sortie des bureaux. Le mec est un fou furieux. Il roule à tombeaux ouvert. Au bout d’une heure de pseudo course poursuite (il est obligé de ralentir la cadence de temps en temps, mon deux temps suranné ne dépassant pas le 110 sur l’autoroute), on se retrouve en pleine campagne. Il finit par se garer devant une petite baraque décrépite. Il fait sombre. Je ne suis pas rassuré. Le gars enlève son casque. Il a le sourire jusqu’aux oreilles et dit :
On rigole un peu. Enfin, surtout lui. Moi je ne suis pas tout à fait détendu. Il me fait signe de le suivre et on entre dans la maison. On passe par un couloir étroit et obscure. Ca sent la clope froide et le renfermé. Au fond de ce couloir, une porte entrouverte d’ou nous parviennent les accords d’une musique qui en ce lieux paraît irréelle. Je reconnais IAM. J’entre dans une petite pièce précédée par le motard hilare. Deux hommes, la trentaine, sont entrain de taper le carton. Le motocycliste me propose un siège. Il tire deux bières d’une glacière d’un coin de la pièce et m’en tend une. De la Budweiser de Budvar. Autant dire que même si je ne sent pas trop le plan, je vais quand même écouter ce que ces gars ont à me dire. Au moins jusqu’à ce que j’ai fini ma Bud. Les joueurs de cartes finissent leur tour . Ils déposent leurs jeux sur la table et me regardent avec insistance. Au bout de quelques instants, que je vis comme une éternité, l’un deux rompt le silence :
Ce gars connait mon prénom.
C’est comme ça que j’ai franchi une nouvelle étape de mon recrutement. C’est là aussi que commence cette aventure avec cette course poursuite en moto et cet entrevue aux allures de coupe gorge. Maintenant que la nature des mes activités sous marines à venir vous semble un peu plus concrète, vous comprendrez aisément pourquoi j’écris ça sous un pseudo. Que les noms des protagonistes ont été changés et que je ne cite et ne citerai aucun lieux qui peuvent donner des informations sur ce qui va suivre pendant les dix années que dur ce récit.
Apprendre à donner le change
Stéphanie me largue au bout d’une semaine. La série continue… Elle sort d’une longue histoire compliquée. Elle me dit qu’elle était bien avec moi, que mes excentricités la font rire. Je suis ravi de l’apprendre. Mais elle n’est pas prête a s’engager. Elle me dit :
L’expression est lancé. Celle là, je vais l’entendre un bon paquet de fois. Moi même, je vais en user un peu, mais bien évidement avec parcimonie. Je retrouve mes potes. On boit des coups pour oublier. J’oublie un peu mais pas trop… Je suis désappointé mais le lendemain c’est les vacances qui commencent. On a deux semaines et je vais pouvoir travailler et gagner un peu d’argent. Je ne suis pas de la région contrairement à mes amis. Ils rentrent tous chez eux et moi je vais aller travailler sur les chantiers. J’ai été recruté par une boite d’intérim mais la mission n’a rien a voir avec la pose de cloisons amovibles dans des bureaux ou la préparation de béton pour des chapes dans des maisons de particuliers. Je vais installer des faux plafonds dans une base aérienne. Je suis ravi ! Alors que d’autre vont se la couler douce à se gaver des bons petits plats de maman. Moi je vais turbiner et en ressortir avec pas grand chose si ce n’est de superbes ampoules des muscles endoloris mais tout de même un peu d’égo.
Mon agent chez Addeco m’a bien précisé de ne pas oublier ma carte d’identité. J’arrive sur le chantier à huit heures du matin. Un planton vérifie mon identité sur une liste et me donne un badge pour pénétrer dans l’enceinte durant toute la durée de la mission. Je dois impérativement conserver mon badge visible et ma carte d’identité sur moi en permanence. Des contrôle peuvent être effectués à tout instant. Je suis ravi de l’apprendre. Je sent que je vais beaucoup m’amuser. Il me file un plan pour me rendre sur les lieux des travaux ou m’attends le chef de chantier. J’erre dans la base quelques temps. Je vois des avions de chasse dans des hangars, des camions de pompiers étincelants. Je trouve enfin le lieux du rendez-vous ou attendent deux autres types de mon âge. On est tous super bien habillés avec nos bleus de travail, nos chaussure de sécurité et nos casques. La grande classe. Digne d’un défilé de mode Chanel version bâtiment et travaux publics. On discute un peu. On est tous étudiants on bosse pour se payer nos études et on a pas la moindre idée de ce en quoi consiste la pose de faux plafonds, ni même de ce que c’est pour être précis. Le chef de chantier se pointe peu de temps après mon arrivée. Il nous regarde avec un petit rictus et dit : « salut les gars ». Ce à quoi on réponds en cœur : « Bonjour Monsieur ». Le « Monsieur » est peut être exagéré mais il semble que, comme moi, les autres gars aient véritablement travaillés sur des chantier et aient eu à se farcir les humeurs d’un responsable farouche, d’autant plus à l’égard d’étudiants qui ne font ça que temporairement. Dans le doute, il vaut mieux arrondir les angles et ménager les susceptibilités. J’ai eu l’occase de me faire virer de chantiers ou de me friter avec des ouvriers. Les mecs sont dur, ne plaisantent pas toujours et quand ils se sentent atteints dans leur honneur, les coups partent vite. Après un « c’est parti » plutôt enjoué on suit le chef de chantier à l’intérieur du bâtiment. Le préfabriqué datant des années 60 et est plutôt miteux. Ils se composent de trois grandes pièces sombres ou il nous demande d’entrer individuellement avec pour seul consigne d’attendre. Dans la mienne il n’y a rien à part un bureau et deux chaises. Pas d’outils, pas d’escabeau, rien de ce que je peux voir habituellement sur un chantier. J’attends patiemment jusqu’à ce que quelqu’un entre dans la pièce. Elle est habillée en civil. Elle se présente :
Un article écrit en Allemagne avec l’aimable contribution de mes berlinois préférés ! Bonne lecture.